Le rôle du linguiste lors d’un rapatriement médical

Vous êtes-vous déjà demandé ce qui se passait en coulisses en cas de blessure à l’étranger ? Lisez la façon dont les linguistes travaillent pour aider les patients à obtenir leur rapatriement, et découvrez les compétences associées à notre travail au quotidien.
Prendre une assurance voyage est une pratique routinière quand on planifie un séjour en vacances, mais savez-vous ce qui se passe réellement en cas de blessure ou de maladie à l’étranger ? J’effectue toute une partie de mon travail en tant que traductrice indépendante pour le compte d’une compagnie d’assurance médicale ; mon travail de linguiste contribue à organiser le rapatriement des résidents britanniques en situation de maladie dans les pays francophones et hispanophones.

Le rôle du linguiste

Lorsque vous tombez malade et que vous contactez votre compagnie d’assurance, en coulisses, les médecins et les infirmiers de l’assurance médicale doivent surveiller votre état et préparer les arrangements spécifiques liés au rapatriement. Ils ne parlent souvent pas les langues nécessaires, et c’est là que j’interviens.

Le rôle du linguiste consiste à appeler l’hôpital, à déterminer dans quel service se trouve le patient et à parler au médecin chargé du cas pour établir le diagnostic de travail, connaître l’état du patient, se renseigner sur le traitement reçu, savoir si une intervention chirurgicale est nécessaire (et si c’est le cas pour en connaitre la durée), savoir combien de temps l’hospitalisation risque de se prolonger et pour se renseigner sur toute recommandation particulière ayant trait au rapatriement.

Mes questions dépendent du diagnostic et varieront largement d’un état de santé à l’autre. Une partie essentielle du rôle est de connaître les questions pertinentes à poser, pour pouvoir fournir à nos médecins et à nos infirmières des informations suffisantes qui leur permettent d’établir la meilleure façon possible de rapatrier un patient. Par exemple, si un patient est sous oxygène, il faut savoir combien de litres sont administrés au sol et connaître toutes les caractéristiques techniques de la médecine aéronautique. Il faut plus d’oxygène en cours de vol pour compenser la baisse de pression en milieu aérien. Dans certains cas, il est nécessaire de retarder le transfert du patient jusqu’à ce qu’il reçoive moins d’oxygène, ou il faut sélectionner un autre moyen de transport (de type ambulance routière, train ou ambulance aérienne).

Il est aussi essentiel de bien comprendre l’état de mobilité du patient : porte-t-il une attelle ? A-t-il besoin d’une assistance en fauteuil roulant ? Va-t-il devoir voyager avec une jambe surélevée ? Faut-il prévoir un siège supplémentaire, ou même deux ? Tous ces éléments ont un impact direct sur le type de vol retour que la compagnie va réserver.

Je suis responsable de la traduction des rapports médicaux envoyés par l’hôpital qui traite le patient. Cela va des mises à jour d’ordre général aux attestations de sortie, en passant par les comptes rendus de chirurgie, plus techniques. Il est vital que ces derniers soient traduits rapidement et avec précision, car notre équipe va mettre en place les modalités de rapatriement et, dans certains cas, il faut organiser une admission directe dans un hôpital britannique sur la base de ces informations.

Tout au long de la préparation du rapatriement, je tiens le service compétent de l’hôpital traitant informé, par exemple pour que le personnel hospitalier sache quand l’équipe médicale va venir récupérer le patient, et pour que l’équipe médicale sache où trouver le patient.

Il est intéressant de noter les tendances saisonnières. De décembre à avril, les cas français et suisses sont principalement le résultat de blessures de ski, ce qui fait vraiment réaliser le pourquoi du surcoût associé à la couverture « sports d’hiver ».

Compétences

D’un point de vue linguistique, j’en apprends tous les jours. La recherche est une composante importante de mon rôle ; il est critique de savoir quelles sont les implications possibles d’une procédure sur le rapatriement du patient. Par exemple, il faut savoir que pour un décollement de la rétine, de l’air peut être inséré dans l’œil lors du traitement. Cet élément est d’une importance capitale, vu qu’il faut alors attendre que le gaz soit absorbé avant de pouvoir faire voyager le patient en avion, sinon, le changement de pression peut entraîner des dommages très graves. En altitude, la pression de l’air diminue, ce qui peut causer l’expansion de l’air ou du gaz piégé dans le corps.

Il est impératif d’avoir des connaissances et une expérience bien spécifique dans ce domaine particulier. Les rapports médicaux comportent souvent des acronymes, qui sont parfois les mêmes qu’en anglais, mais pas systématiquement. Certaines expressions idiomatiques peuvent semer le trouble quand on les rencontre pour la première fois : par exemple, le terme « coup de hache » (“an axe blow”) dans un rapport en français, dans le contexte d’une blessure de ski, est pour le moins déconcertant ; mais d’expérience, je sais qu’il s’agit du terme utilisé pour décrire le creux formé dans le dos en cas de luxation de l’épaule.

En tant que linguiste, il est essentiel de travailler rapidement, sans pour autant compromettre l’exactitude. Les plans de rapatriement ne peuvent pas être lancés sans ces informations, et il faut absolument qu’elles soient correctes.

Savoir planifier est une autre compétence clé dans mon rôle. Je couvre les cas en français et en espagnol partout dans le monde, ce qui souvent, peut impliquer des pays lointains tels que Maurice et le Pérou. C’est pourquoi j’organise ma journée en fonction du degré d’urgence et de l’emplacement géographique du pays, afin de pouvoir contacter et trouver les médecins traitants le matin.

Ceci n’est qu’un bref aperçu de certains aspects du travail en langue que j’effectue régulièrement. J’ai un rôle varié, intéressant, et il ne se passe pas une journée sans que j’apprenne quelque-chose. La combinaison français-espagnol, et le fait de pouvoir traduire ces deux langues, s’avère être incroyablement gratifiant.